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Étiquette : Entretien

La transphobie dans les discours et les pratiques psychologiques

L. R

Militante fem & féministe, engagée dans les luttes transpédégouines
(Ex-?) étudiante en psychologie

La transphobie dans les discours et les pratiques psychologiques

 

Mon engagement militant, au sein des luttes féministes et transpédégouines, allié à la colère grandissante que m’inspirait une partie de mon cursus universitaire en psychologie, m’ont amené à vouloir étudier la transphobie dont se rendait coupable un certain pan de la psychologie. Je vais vous présenter un résumé de mon Travail d’Etudes et de Recherche (TER) de fin de licence, datant de 2011.

L’objectif de ce TER était donc de faire un état des lieux des dysfonctionnements dans la prise en charge des personnes trans par les professionnels de la santé mentale et dans la voix dominante de la psychanalyse sur les transidentités, ainsi que de mener une réflexion sur les causes et les éventuelles solutions que nous pouvons leur associer. En guise d’illustrations, quelques extraits de témoignages de trans sur leur vécu personnel de psychologie transphobe .

Je précise que je suis cissexuelle, si j’ai décidé d’écrire sur ce sujet, c’est parce que je me sens plus proche de la communauté TPG que du monde psy et j’ai vu les effets néfastes que provoque la transphobie des psys, sur des proches. Malheureusement, nous ne sommes pas beaucoup à essayer de distiller des idées allant à contre-courant en psychologie et quand nous le faisons, nous ne sommes pas toujours écouté-e-s car il est facile d’invalider nos dires propos sous prétexte que nous sommes « trop militant-e-s » et trop peu « neutres », mais qui peut l’être..?

Comment la transphobie psychologique s’exprime-t-elle ?

J’ai proposé quelques pistes de classification des actes et écrits transphobes liés au domaine de la psychologie : le choix des (mauvais) pronoms, l’exotisation et la stigmatisation du sujet trans, la construction du thème de la souffrance et son essentialisation (cette idée récurrente que c’est le fait même d’être trans qui provoque la souffrance et non le fait de le vivre dans une société transphobe), la réassignation ainsi que la pratique de tests (psychométriques et dits « de vie réelle »).

« Le temps qu’il prenne ma carte vitale, se rende compte que mon état civil était féminin, et s’en amuse. Je lui ai expliqué ce qui m’amenait. Il m’a répondu aussi sec qu’il comprenait que tout ça devait être très douloureux (je n’ai absolument pas parlé de souffrance) mais qu’il ne pouvait pas se mettre en danger en me mettant « encore plus dans la merde ». […] J’ai trouvé ça formidable qu’une personne qui ne voulait pas me mettre « encore plus dans la merde » me laisse ressortir de son bureau en larmes, sans m’orienter vers un-e collègue, après s’être moqué de mon identité […] J’allais plutôt bien en entrant dans son bureau, et j’en suis ressorti dans un état catastrophique. J’ai mis 2 ans à pouvoir envisager de retourner voir un-e psy après cette visite. »

Extrait du témoignage de S.

Pourquoi tant de haine ?

Difficile de comprendre les diverses raisons qui motivent la transphobie de la part des psychologues et autres professionnels de la santé mentale.

Cependant, la notion de contre-transfert (en dépit de sa connotation très psychanalytique) est intéressante dans ce contexte : le contre-transfert désigne la projection d’affects de la part du psy sur le-a patient-e, ce qui vient troubler, plus ou moins, la neutralité du psy et la qualité de son écoute ou de son aide.

Le moins que l’on puisse dire est que certains spécialistes de ce qu’ils appellent « la question transsexuelle » ont une façon très étrange de recevoir ces sujets trans et de retranscrire les pensées qu’illes leur évoquent par la suite.

Preuve en est cette phrase malheureuse de P. Mercader :

« Pendant la première phase de mon travail, alors que je rencontrais des femmes en demande de changement de sexe, et par conséquent d’abord d’une mammectomie, je me suis aperçue un soir que depuis quelques temps, je m’endormais les mains posées sur ma poitrine, comme pour la protéger. »

Les psychologues qui ont sciemment choisi de faire de la transidentité un fond de commerce sont précisément ceux qui font le plus preuve de violence dans leurs écrits.

On ne leur reproche pas tant d’être incapable de faire preuve d’une neutralité parfaite, mais de médiatiser leur « connaissance » du sujet en dépit du fait qu’illes ne peuvent le faire sans l’accompagner de propos discriminants, insultants, culpabilisateurs à l’égard des trans : de leurs patient-e-s trans, mais aussi de tou-te-s les lectrices trans potentiel-le-s.

Un autre exemple dans la littérature illustre bien cette notion de contre-transfert et de violence dans les propos, il s’agit d’une citation extraite de l’ouvrage de G. Morel : Des ambiguïtés sexuelles, sexuation et psychose :

« Dans le cas de Ven, il n’était pas possible, au moment de la cure, d’essayer de lui créer une identité féminine dont il ne voulait même pas entendre parler. C’est pourquoi j’ai pris le parti d’accepter le travestissement et de rentrer dans la logique qui l’amenait à l’opération pour, à un moment donné, intervenir contre, mais conformément à cette logique originale. »

On remarque que G. Morel négocie avec ses propres limites et ses propres mœurs ce qu’elle accepte pour Ven, trans FtM, et ce qu’elle lui refuse. Qu’entend-elle par « j’ai pris le parti d’accepter le travestissement », comme un parent ferait référence à une facétie de leur enfant adolescent ? Et si elle ne l’avait pas accepté, que ce serait-il passé ?

La question du transfert -que l’on y croie ou non- ici est cruciale puisqu’on voit bien que c’est sa position dans le transfert qui lui laisse penser qu’avec le temps et une stratégie d’apparente « acceptation », elle pourra faire rebrousser chemin à son patient.

Je m’interroge aussi sur cette phrase : « il n’était pas possible, au moment de la cure, de luicréer une identité féminine ».

G. Morel aurait-elle ce pouvoir ?

S’essaie-t-elle à cet étrange tour de passe-passe avec des patients moins avancés dans leur transition? L’histoire ne dit pas, en tout cas, si elle a réussi à infléchir la volonté de Ven de bénéficier d’une opération. Plus loin, elle évoque la « stratégie de l’analyste »… mais pour arriver à quelles fins ?

« Après lui avoir expliqué en quoi consistent les parcours officiels, notamment sur la très longue durée du suivi psychiatrique avant de commencer quoi que ce soit de concret, il a pris systématiquement la défense de ses confrères, comme quoi il y avait bien une raison et que 2 ans sur les 60 ans qu’il me reste encore à vivre, ce n’est pas dramatique. Il a fini par « il faudra que vous soyez patiente ». Oui, après tout mon discours, il s’est quand même permis d’utiliser le féminin, le genre qui ne m’est pas adapté. Comme pour enfoncer le clou et me rappeler qu’il ne peut absolument rien pour moi, pas même le respect d’utiliser le genre que j’étais venu revendiquer. »

 Extrait du témoignage de J.

Évidemment, il est impossible d’oublier de parler de C. Chiland, à qui j’avais réservé dans mon TER un chapitre entier intitulé « un cas d’école » car c’est finalement comme ça que j’ai été amenée à la considérer après avoir compulsé nombre de livres et articles sur le sujet.

J’ai appris l’existence de cette personne par mon copain, qui est trans, et qui discutait avec un autre mec trans, découvrant par la même occasion que C. Chiland était une institution (et pas dans le bon sens du terme!) à elle toute seule dans le militantisme trans. Le genre dont on parle avec un petit sourire ou une moue d’exaspération.

C’est d’ailleurs un article édifiant d’elle qui m’a donné envie de réfléchir à la violence psychologique dont peuvent faire preuve certain-e-s psychologues à l’égard des sujets trans.

L’article « Problèmes posés aux psychanalystes par les transsexuels » est révélateur de la position de C. Chiland et celle-ci a valeur de vérité pour malheureusement trop de psychologues concernant la manière de penser et traiter les trans.

Le plus grave problème avec C. Chiland est qu’elle fait preuve d’une redoutable imperméabilité à ce qu’on lui dit, l’inverse lui permettrait peut-être de cesser de comparer la transidentité à une idée folle.

Je ne reproduirais pas ici les citations de C. Chiland que j’ai utilisé dans mon travail de peur que ce texte devienne à son tour violent pour une personne trans qui le lirait. À mon humble avis, aucun-e trans ne devrait être amené-e à tomber par surprise sur une citation de C. Chiland.

Je dirais seulement que C. Chiland va jusqu’à parler d’humaniser une patiente trans. Quel-le humain-e peut se permettre de vouloir entreprendre « l’humanisation » d’un-e autre ?

J’ai beaucoup entendu parler des dérives liées à la toute-puissance accordée au psychologue dans le cadre du suivi de trans, c’en est un exemple édifiant.

« Et là, suspens de quelques secondes, suivi d’un « C’est non, c’est un effet de mode que je ne tolère pas, si la thérapie ne vous intéresse pas, je ne peux rien pour vous »… Au plus haut niveau de déception, je me suis donc levé en lui disant qu’on avait plus rien à se dire dans ce cas, et je suis parti… »

Extrait du témoignage de J.

« Il est arrivé en retard m’a appelé par mon prénom féminin en insistant bien sur le « mademoiselle » et est rentré dans son bureau sans plus me regarder, ni me dire bonjour. Je me suis assis en face de lui et lui ai exposé le problème. Me coupant en plein milieu de mon explication il m’a dit « je vous appellerai mademoiselle, vous n’avez entamé aucun parcours et vu votre jeunesse, vous n’en entamerez aucun pour le moment. Vous êtes donc une femme, inutile de me dire le contraire. De plus, je pense que vous avez surtout un problème d’ordre psychologique ».

Extrait du témoignage de A.

Dans l’idéal éthique que je m’imagine de la pratique de psychologue, de telles paroles auraient dû provoquer un tollé de réactions indignées. Ce ne fut pas le cas -dans le monde psychanalytique et psychologique du moins.

Le code de déontologie des psychologues commence ainsi :

« Le respect de la personne humaine dans sa dimension psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des psychologues. »

Il dit aussi :

« Article 19: Le psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la personnalité des individus, notamment lorsque ces conclusions peuvent avoir une influence directe sur leur existence »

Il semble évident que le seul fait de parler d’ « humaniser » une patiente va tout à fait à l’encontre de ce principe.

Je ne finirai pas ce syllogisme car je crois savoir que C. Chiland s’est montrée plutôt mécontente et irritée à la lecture de mon travail, au point de rédiger une petite lettre au président de l’université où j’étudie pour protester et crier au scandale s’il s’avérait que mon TER me permettait d’obtenir ma licence de psychologie (et un rapide calcul de coefficients me prouva que ce fut bien le cas !).

Bref, fort heureusement, la communauté trans a fait un remarquable travail d’information sur les productions de C. Chiland et j’ai l’impression qu’en ce qui concerne le monde psychologique, son style pour le moins abrupt a le mérite de refroidir la plupart des psys. Cela n’empêche qu’il est très problématique qu’elle soit l’auteure d’un Que-sais-je ? -c’est à dire d’un ouvrage grand public- sur le sujet.

Même Jacques Lacan, le « grand Maître » de la psychanalyse moderne (en (f)rance, dont tout-e étudiant-e de psycho a entendu vanter les mérites pendant des heures entières de son cursus universitaire… y est allé de sa contribution transphobe. (J. Lacan, Sur l’identité sexuelle: à propos du transsexualisme, Entretien avec Michel H. (Le discours psychanalytique), Paris, Association Freudienne Internationale, (1996) pp. 312-347)

Heureusement, tous les concepts créés par la psychologie ne sont pas transphobes et il en est un qui est à la fois très intéressant et utile pour discuter des nombreux travers dont se rend coupable la psychologie vis-à-vis des trans, ce concept est celui de maltraitance théorique, développé par Françoise Sironi :

« Ce phénomène apparaît lorsque les théories sous-jacentes à des pratiques sont plaquées sur une réalité clinique qu’elles recouvrent, qu’elles redécoupent ou qu’elles ignorent. Elles agissent alors comme de véritables discrédits envers la spécificité des problématiques et des populations concernées. Ce type de maltraitance a un impact direct et visible sur les patients, les cliniciens, et sur la production de savoir dans la discipline concernée. On comprend alors que la portée de la maltraitance théorique n’est pas uniquement clinique, elle est politique. »

(extrait de F. Sironi, Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres,Odile Jacob, 2011. p 14)

Ce qui est à la fois déstabilisant et révolutionnaire dans son propos est la reconnaissance d’une possible aggravation de l’état mental d’origine (due au contre-transfert) et la méprise qui consisterait à confondre le résultat de cette aggravation avec la pathologie qu’on essaie de déceler.

« La maltraitance par les théories et les pratiques génère des symptômes spécifiques qui sont souvent confondus avec la pathologie initiale du patient. Ces symptômes sont mis sur le compte d’une atypicité du tableau clinique, ou d’une “réactivité trop forte” du patient à l’impact de la pathologie initiale. Il s’agit de l’exacerbation du sentiment d’injustice et d’incompréhension, d’apparition de phobies, de généralisation de la méfiance, d’une hyper-réactivité, d’une anxiété permanente et diffuse, d’un repli taciturne et de vécus dépressifs majeurs. »

L’apparition de phobies puis de comportements d’évitement n’est qu’un des symptômes possibles de cette pathologie iatrogène, réactionnelle. Le mot iatrogène signifie « produit par le traitement ». Celle ci est, concrètement, cause de souffrances « comme la répétition de rejets préalablement vécus, une attitude de combat contre les projections inconscientes mais fortement ressenties, et une attitude de préservation, peu propice à l’introspection confiante qui est normalement attendue en pareille situation. » et d’après F. Sironi, ce phénomène n’est pas tout à fait étranger au risque de suicide :

« C’est cet enfermement « hors les murs », produit à la fois par une incompréhension familiale, sociale et aussi de la part des « psys » qui a conduit plus d’une personne transsexuelle au suicide »

Un autre effet néfaste est le discrédit et la méfiance des trans vis à vis des psychologues, perçu-e-s comme un groupe homogène hostile à leur démarche de transition. En effet, les psychologues et psychanalystes qu’on entend le plus, qu’on lit le plus sont ceux qui ont les idées les plus réactionnaires et empreintes de maltraitance théorique !

Au fond, la question n’est en effet pas tant de savoir pourquoi certain-e-s psychologues se comportent de la façon précédemment décrite envers les trans mais pourquoi illes ont fait en sorte que ce soient elles et eux que l’on entende, que l’on lise ou à qui l’on se réfère lorsqu’il est question des trans.

L’hypothèse selon laquelle certain-e-s d’entre eux agissent en quelque sorte par militantisme, par conviction en se portant garant d’une certaine morale n’est pas excluable. Si l’on revient sur l’exemple de C. Chiland, on peut noter que son discours sur les trans revêt la même rigidité conservatrice que son discours sur les homosexuel-le-s. On peut réellement faire un parallèle entre le traitement psy de ces deux minorités, à la différence près qu’en (f)rance, les trans, contrairement aux homosexuel-le-s subissent toujours une pathologisation officialisée, le rapport à la psychiatrie et la psychologie est donc différent.

« Le rendez-vous avec elle a duré tout au plus 10 minutes : elle m’a regardé d’un air méprisant pour commencer, et dans l’ordre : a ouvert mon dossier à toute vitesse, l’air exaspéré, lu les 3 premières lignes de ma bio, regardé mes photos d’enfance en en sautant la moitié du paquet, bref… Le tempo était donné… Pour conclure par un « bon alors vous voulez quoi hmmm…? Vous savez ce qu’on fait aux transsexuels qui veulent une phallo ? On leur prélève un lambeau radial d’un cm dont la cicatrice reste affreuse tout le reste de leur vie…! » Alors qu’il n’a jamais été question pour moi d’envisager une phalloplastie… Je n’ai même pas eu la liberté de lui répondre qu’elle avait déjà clos le dossier et la consultation par la même occasion d’un « bon allez… (sourire entendu) Vous êtes plutôt bien de votre personne alors restez comme ça hmm… » »

Extrait du témoignage de M.

Pour ce qui est des propositions et des solutions pour que le suivi des trans (que ce suivi soit en lien ou non avec la transition) s’améliore, je pense que la communauté trans aurait bien plus à dire que moi. J’ai cru comprendre à son contact qu’elle a même beaucoup à apprendre aux psychologues en matière d’écoute, d’entre-aide et d’empathie.

La communauté trans a d’ailleurs développé, pour pallier à la mauvaise qualité des soins psys qui lui étaient proposés, un remarquable réseau d’auto-support et de solidarité, notamment via Internet.

L’empowerment, la création de dispositifs comme les forums, les sites informatifs et les brochures faites par des trans et des associations trans comme Chrysalide à Lyon ou Outrans à Paris permettent une réappropriation de la parole et des savoirs.

En parlant de réappropriation de la parole, voici un entretien réalisé avec Raph, un militant trans rennais qui propose des formations sur les transidentités.

* * *

• Quelle est la raison de la création de tels ateliers-formations ? En quoi consistent les ateliers-formations que vous proposez à Rennes et à qui s’adressent-ils?

• L’idée de ces ateliers-formations est née du constat du manque d’information dont les associations LGBT (Lesbiennes, Gays, Bi et Trans) sur les thématiques trans. Des trans venaient aux permanences proposées par les associations, mais celles-ci n’étaient pas en mesure de répondre aux questions sur les parcours trans, et les trans reçu-e-s ou fréquentant ces associations étaient parfois victime de la transphobie (de la transphobie basique ou émanant d’un manque d’informations) de la part des bénévoles LGB.

Ces formations mettent aussi en avant les revendications des trans, qui sont parfois méconnues par des associations qui se revendiquent comme LGBT, mais qui n’ont des revendications axées que sur l’homosexualité.

Ces ateliers-formations consistent concrètement à présenter les parcours trans médicalisés ou non (dans leur diversité, comme il n’existe pas un seul type de parcours et que ce parcours n’est pas forcément médicalisé), la distinction entre orientation sexuelle, genre social et genre psychologique, les revendications trans, les difficultés que rencontrent les trans face à l’État, aux professionnel-le-s de santé et aux administrations, et des conseils concernant l’accueil des personnes trans (ne pas genrer les personnes avant qu’elles ne le fassent elles-même, utiliser le bon prénom, ne pas poser de questions intrusives, etc…).

• Quelles sont les réactions du public auquel vous les proposez ?

• Le public est généralement intéressé par la formation, et en ressort plutôt choqué par le traitement des trans par l’État français et les médecins.

• Pourquoi estimez vous qu’en tant que trans, vous êtes les plus à même de dispenser ces formations ?

• Les expert-e-s auto-proclamé-e-s ont eu la parole pendant trop longtemps. Il-le-s parlent de ce qu’il-le-s connaissent à travers des témoignages biaisés de personnes trans obligé-e-s d’adapter leur discours (même si ce discours correspond dans certains cas ce que vivent certain-e-s trans, mais de loin pas tout-e-s) à ce qu’attendent les psys pour pouvoir vivre leurs vies comme il-les l’entendent. Nous devons nous ré-approprier cette expertise.

Nous sommes les seul-e-s capables de dire (et légitimes à le faire) comment nous vivons nos identités. Nous n’avons pas besoin d’études sur pourquoi nos identités sont différentes de celles des cisgenres, nous avons besoin que les médecins écoutent nos vécus et se rendent à l’évidence qu’il-le-s n’ont jamais réussi à changer l’identité de quiconque, et que la solution pour les trans qui désirent entamer une transition médicalisée est de l’entamer.

Les psys qui ont de toute évidence un gros problème de transphobie (comme Chiland, Mercader, etc, etc, etc…) et qui semblent avoir peur des trans (Chiland avec son affolement de la boussole, Mercader qui s’endort avec ses mains sur ses seins depuis qu’elle prend des transboys en consultation, etc…) devraient, pour le bien de tout le monde (aussi bien des médecins que des trans) arrêter de travailler sur nos vécus.

La dernière chose dont ont besoin les trans, c’est de médecins méprisant-e-s qui pensent qu’on a une « idée folle ». Ces personnes n’ont de toute évidence pas compris grand chose aux transidentités et devraient se mêler de ce qui les regarde: leur transphobie.

On peut nous répondre que les médecins sont des professionnel-le-s et savent ce qu’ille-s font, mais si c’était vraiment le cas, les trans n’auraient pas à ce soucier de la maltraitance théorique de la part de leurs psychiatres, des prescriptions d’hormones inutiles et dangereuses de la part de leurs endocrinologues (Lutéran) et des non-compétences des chirurgien-ne-s français-e-s en matière de chirurgie pour certains types d’opérations et de suivi post-opératoire.

• Votre dernière formation était destinée aux professionnel-le-s de santé.

Comment s’est-elle déroulée?

• Bien que 100 lettres et des mails aient été envoyés à des médecins, à l’Ordre des Médecins du 35 et au deux IFSI de Rennes par Commune Vision, l’association qui organisait, AUCUN médecin n’est venu. J’ai été très déçu de l’indifférence des professionnel-le-s de santé face à ce sujet. L’indifférence face au fait qu’une partie de la population préfère souvent ne pas aller se faire soigner en raison des préjugés des professionnel-le-s de santé sur les transidentités est tout simplement dangereux. Le fait d’être trans, de donner gratuitement de son temps, d’accepter de servir de support pédagogique pour pallier le manque de formation des médecins, et le manque d’informations sur les transidentités, tout ça pour se retrouver sans professionnel-le-s de santé, ça me met vraiment en colère.

Je pense soit que les médecins se sentent super aptes à accueillir des trans (et en tant que trans qui va comme tout le monde chez le médecin de temps en temps, je peux attester que je n’ai jamais rencontré un-e médecin qui n’ait aucun préjugé sur les trans, qui ne m’ait jamais soit posé une question déplacée ou qui n’ait jamais fait de lien entre ma transidentité et la raison pour laquelle je venais le/a consulter), soit ille-s refusent d’écouter des trans parler de leurs problèmes avec les médecins, de leur santé, de leurs identités, d’écouter les conseils qu’il-le-s ont à leur donner, parce qu’ille-s ne veulent pas reconnaître que nous savons mieux qu’ell-eux ce que nous vivons.

* * *

Et ensuite ?

Les années passent et malgré les tracts des assos, les communiqués, les Existrans et autres manifs, la transidentité figure toujours dans le DSM et est toujours considérée comme une maladie mentale.

L’amélioration globale du suivi des trans risque de rester plafonnée tant que cela sera le cas.

On ne peut pas nier qu’il y a beaucoup de dérives dans le traitement discursif et clinique de la transidentité et donc des personnes trans. Des témoignages émergent, révélant des comportements indignes du potentiel de la psychologie clinique. Les trans en ont marre d’entendre parler d’elleux et de leurs réalités en des termes qui ne les reflètent pas et semblent bien décidés à faire entendre leur voix pour que cela évolue.

Un réel défi se pose dès lors à la psychologie, à la psychanalyse et à la psychiatrie : sauront-illes entendre cette indignation et y apporterons nous notre soutien ? Cela ne pourra se faire sans se détourner de certains discours qui ne peuvent plus être tolérés, comme ceux de C. Chiland dont nous avons étudié et critiqué la teneur.

Il sera dur pour certain-e-s de reconnaître que dans cette situation un choix s’impose et que se placer du côté des militants ne peut que rapprocher de l’éthique que se doit d’avoir tout-e psychologue. Si l’on fait un parallèle avec le traitement de l’homosexualité, il est naturel que ce changement s’accompagne de l’abandon du statut d’expert-e par des psychologues non-trans et du retrait de la transidentité de la nosographie internationale des pathologies mentales.

Ce qui peut nécessiter un accompagnement psychologique -volontairement engagé par la personne et non imposée dans le cadre d’un parcours- doit être laissé à l’appréciation de celle-ci : il se peut que les changements corporels occasionnés par l’hormonothérapie, même s’ils sont quasiment tout le temps accueillis avec joie et soulagement, donnent matière à discuter de cette nécessité de s’adapter à un corps et un regard social modifiés, par exemple. Ou pas.

Pour cette raison, nous pouvons conclure sur l’hypothèse qu’il serait bénéfique à la fois pour les professionnel-les de la santé mentale et les trans que les premier-e-s apprennent à écouter les seconds et prennent la responsabilité de prendre leurs distances par rapport aux discours discréditants, irrespectueux et inadaptés produits sur les trans et souvent contre elleux.. Il serait aussi très bénéfique que les psychologues respectueux-ses des trans, dont je n’ai pas beaucoup parlé, il est vrai, mais dont je ne doute pas de l’existence pour autant, se fassent connaître et partagent leur expérience, notamment sur le phénomène du contre-transfert et la manière dont illes ont réussi à le gérer afin de faire alliance avec les trans contre la transphobie institutionnalisée dans les discours et les pratiques psychiatriques, psychologiques et psychanalytiques…


 Biblio (pas très recommandable)

• J.P JACQUES « Le discours transsexuel sur le corps », Cahiers de psychologie clinique 1/2008 (n°30), p. 147-158.

• C.MILLOT, Horsexe, essai sur le transsexualisme, 1983.

• J. LACAN, Sur l’identité sexuelle : à propos du transsexualisme, Entretien avec Michel H. (Le discours psychanalytique), Paris, Association Freudienne Internationale, (1996)

• J. LACAN, La relation d’objet, Paris, Seuil, 1994, séance du 27 février 1957

• C. CHILAND, Changer de sexe, 1997.

• P. MERCADER, L’illusion transsexuelle, 1994.

• C.CHILAND, Le transsexualisme, collection Que sais-je ?, 2003.

• G. MOREL, Ambiguïtés sexuelles, sexuation et psychose, 2000.


Mise en ligne : 30 mai 2013.

Interview Tom Reucher, psychologue clinicien trans

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A la suite aux Journées d’études du 17 décembre 2010 à la Sorbonne, nous voulions revenir sur la notion d’expertise souvent usitée dans le sujet du transsexualisme, savoir ce qu’elle est, ce qu’elle apporte, qui l’apporte et pourquoi dans un contexte où la revendication à la dépsychiatrisation pour améliorer les suivis, apporter une aide plus efficace aux personnes concernées, butte sur un pouvoir manifeste. Ici, est reposée la question du savoir/pouvoir foucaldien.

Interview Tom Reucher, psychologue clinicien (Etudes : Université de Paris 8 Vincennes – Saint-Denis), co-fondateur de l’Association du Syndrome de Benjamin (1994-2008) quittée en 2004, co-fondateur de l’ExisTrans, la marche des trans’ et de ceux qui les soutiennent (1997), co-fondateur de VigiTrans (2002-2004), co-fondateur de Bistouri oui-oui, la première émission trans’ sur Radio Libertaire FM 89.4 Mhz (2003-2006), membre du Groupe Activiste Trans’ (2003-2006), membre de Sans contrefaçon.

Site internet , Transidentités

 

La question trans, la question de  l’expertise

Question : Qu’entends-tu par expertise Trans ?

– C’est le fait, pour une personne trans’, d’avoir une bonne connaissance de son expérience, d’être capable d’en parler et c’est au minimum d’avoir un peu avancé dans le parcours (avoir pris suffisamment d’information est une façon de commencer à avancer dans le parcours). Quelqu’un qui débarque comme ça, qui ne s’est pas renseigné, n’en est pas encore là. Cela ne veut pas dire qu’il n’aura pas plus tard lui aussi cette possibilité. Un expert, c’est aussi et surtout quelqu’un qui s’est donné les moyens d’acquérir des connaissances et qui, du fait de son parcours, acquiert une expérience de vécu, ce qui lui donne la capacité d’une double expertise : le vécu et la connaissance. Le vécu de l’expérience est certes important et même nécessaire, mais le niveau d’expertise est différent si on a acquis en plus d’autres connaissances en rapport avec la question.

Question : Peut-on dire que c’est une connaissance objective ou que cela au-delà du simple fait de l’avoir vécu ?

– Cela va au-delà du vécu si la personne s’est donnée les moyens de comprendre, d’apprendre des choses, de lire, d’avoir des informations sur les traitements, sur la politique, la sociologie, etc., ce qui donne une capacité d’analyse importante et indispensable si on veut atteindre un haut niveau. Quand ça va jusque là, c’est vraiment une expertise, au sens de l’expertise comme on pourrait en avoir chez d’autres professionnels.

 Question : Le mot d’expertise ne renvoie pas simplement au fait de savoir un certain nombre de choses mais d’être capable de faire une synthèse globale sur un sujet tout en ayant une certaine distance par rapport à son sujet. Il est marqué de cette distance. Là, c’est une expertise de l’intérieur.

– C’est les deux à la fois, l’expertise comme tu le décris et l’avoir vécu de l’intérieur, qui apporte un plus, un éclairage que l’on n’aurait pas autrement. C’est d’ailleurs ce qui manque à certains professionnels qui s’occupent du sujet et finalement n’écoutent pas tellement ce que disent les gens. Pas suffisamment en tout cas pour comprendre cette question subjective du vécu.

 

Question : Tu estimes que les gens n’ont pas été écoutés ? Du coup la relation qui était sensée être un suivi est obérée par cette non-écoute ?

– Oui. Si en médecine, écouter les personnes permet d’avoir des informations sur les symptômes et d’aider au diagnostic, c’est d’autant plus vrai en psychologie.

 

Question : Y a-t-il d’autres cas en psychologie où il y a cette relation de dialogue entre les usagers et les médecins qui prennent en compte cette co-aide à un co-diagnostic ?

– Les maladies rares ont été un cas ou les associations sont reconnues comme des experts participants dans la prise en charge, le sida aussi où il a fallu que les associations s’imposent. Maintenant, leur expertise est reconnue. Concernant l’autisme, c’est encore une difficulté. Il y a effectivement une partie des autistes qui ne sont pas capables d’exprimer des choses car ils ont un double handicap, l’autisme et le retard mental mais ceux qui ont seulement l’autisme et pas le retard mental, entre autres les Asperger, souvent associés à des intelligences au-dessus de la moyenne, ceux-là commencent à avoir des revendications mais qui sont loin d’être entendues en France. Il y a quelques praticiens dans d’autres pays qui acceptent de les écouter et de les entendre mais ce n’est pas la majorité.

 

Question : On peut faire le lien avec les associations de personnes intersexes. On a le sentiment très net alors qu’ils se sont regroupés en associations, non seulement en usagers, au sens classique du terme mais également en groupe de parole, de réflexion, d’études sur ce qui leur est arrivé. Est-ce qu’ils n’ont pas le même souci avec un pouvoir qui dit, à leur place, ce qui est bon pour eux ?

– Je pense qu’ils ont le même souci, on ne les écoute pas tellement non plus ou pas partout. Il commence à y avoir des moratoires dans certains pays suite à leurs démarches mais ce n’est pas le cas en France. Et surtout, à cause de l’emprise médicale que les intersexes (et les autistes) subissent dès leur enfance, leurs difficultés sont plus importantes que celles des trans’. Il n’y a qu’à voir ce qui se passe, c’est très marginal. On a un retard sur beaucoup de choses, on n’a pas de mouvement autiste en France, il y en a un aux USA. En Europe il commence à en avoir un et c’est pareil pour les intersexes, il n’y a pas de mouvement intersexe digne de ce nom en France. Il y a 2 ou 3 associations mais avec des gens très isolés. Les revendications des autistes et des intersexes se rejoignent en ce sens que les premiers parlent d’une variation du développement neurologique et les seconds d’une variation du développement sexuel.

 

Question : Y a t-il des Trans qui ne sont pas “experts” ?

– Oui dans le sens où ils ont compris qu’ils veulent arriver à vivre dans l’autre sexe. Après, le détail des traitements qu’ils ont et pourquoi c’est ça plutôt qu’autre chose, ils n’en ont aucune idée. Ils s’en sont vraiment remis à ce que disent les médecins, ils sont très contents de ça, ils se satisfont de ça. Ceux-là ne revendiquent ni une expertise ni le fait d’avoir des choses particulières à dire. Ce qu’ils veulent, c’est vivre leur vie, ils ne se revendiquent pas comme experts. Donc je ne pense pas qu’on puisse les mettre à cette place. Cela ne veut pas dire qu’ils ne pourront ou ne voudront pas devenir des experts. Maintenant il y a des niveaux d’expertises très variables dans la communauté. Certains trans’ ont des connaissances approfondies dans quelques domaines, d’autres dans plusieurs autres domaines et puis d’autres ont des connaissances plus génériques, d’autres encore ont une petite expérience dans plusieurs domaines mais pas à un haut niveau. Donc là aussi, c’est très variable. Par contre, ce que les trans’ ont comme expérience, en tout cas dans les associations militantes, c’est une bonne réponse pour aider les gens. C’est aussi ce qui avait été mis en place à l’ASB, qui fonctionnait bien. C’est en cela que les associations ont une expertise, elles savent où orienter en fonction du profil des gens.

 

Question : C’est donc une sorte d’équivalence entre un rapport et un discours “savant” opposés à un discours “profane” que tu proposes. Les profanes sont devenus savants et les savants sont profanes devant nous.

– Dans ce domaine, les professionnels sont profanes, ils ne savent pas ce que l’on vit. Et ils ne le sauront jamais puisqu’ils ne sont pas trans’.

 

Question : Ne peuvent-ils pas comprendre ? Tout le monde fait des projections par expérience. Au bout de quelques années, ils voient qu’on vit des stigmatisations, des discriminations.

– On peut le comprendre intellectuellement mais c’est une chose que de le vivre au quotidien. Se faire insulter dans la rue, se faire refuser un recommandé à la poste, c’est une chose de le vivre quotidiennement, c’est une autre chose que de le comprendre intellectuellement. Maintenant, ça ne veut pas dire qu’un bon clinicien n’est pas capable de comprendre certaines choses, qu’il ne peut pas être un bon accompagnateur, mais dans ce cas, il n’aura pas une idée préconçue de ce qui est mieux pour la personne. Il entendra ce que dit la personne et sera capable de s’ajuster à ses besoins spécifiques. Pour une autre personne qui fait aussi un parcours trans’, ces besoins spécifiques ne seront pas les mêmes. 

 

Question : Au début des années 80, lorsque J. Breton monte la première équipe, je me souviens des propos du chirurgien, P. Banzet qui avançait l’argument de la compassion. La compassion envers les transsexuels, envers la souffrance, l’isolement et tout cela, ça venait comme une sorte de bruit de fond pour justifier l’interventionnisme médico-chirurgical. Dix ans plus tard, ce discours avaient disparu pour une pathologisation généralisée. Même avec les difficultés de compréhension, Banzet semblait « comprendre » de l’intérieur ?

– Je n’ai jamais trouvé qu’il était dans cette position (comprendre de l’intérieur) mais il était bien dans la compassion, dans son rôle de médecin, de chirurgien. C’est grâce à une personne qui s’était émasculée deux fois. La première il a essayé de réparer les dégâts en remettant les choses en place et la seconde, il a décidé d’opérer cette personne en comprenant qu’il y aurait une troisième fois s’il n’accédait pas à sa demande, qu’il était plus sage d’aller dans ce sens là plutôt que de s’y opposer. Je pense qu’il a compris que cela ne servait à rien d’aller contre et qu’il y avait quelque chose à faire dans ce sens et voir ce que cela allait donner. C’était une preuve d’intelligence mais le Pr P. Banzet est en retraite et ceux qui l’ont remplacé n’ont pas forcément la même ouverture d’esprit.

 

Question : Avant ce revirement personnel, subjectif, c’est un univers de violences que tu décris.

– Cela a toujours été. Pour reprendre les mots de Colette Chiland et de ses collègues, s’il n’apparaît pas de problèmes physiologiques, c’est donc dans la tête que ça se passe. Cela a été systématiquement leur conclusion : puisqu’il n’y a pas de preuves physiques, alors c’est que c’est dans la tête.

 

Question : Mais les transsexuels eux-mêmes disent que c’est dans la tête.

– Il y a un décalage entre ce qu’ils ressentent psychiquement et leur corps, c’est en cela qu’ils disent que c’est dans la tête. Mais cela ne veut pas dire que c’est une maladie mentale. Je ne sais pas pourquoi l’identification se fait de cette façon là et pas autrement chez les trans’ et pourquoi chez d’autres elle se fait différemment. Pourquoi chez les cisgenres, se fait-elle dans le sens physiologique, et pourquoi chez les trans’ n’est-ce pas le cas ? On n’a pas trouvé de cause. Majoritairement, le développement identitaire suit la physiologie, dans d’autres cas, il ne le suit pas, indépendamment de la culture. Si celle-ci favorisait les variations de l’identité de genre, les gens seraient plus à l’aise dans leur propre différence identitaire. C’est en cela que la culture influence l’acceptation ou pas, la transphobie intériorisée ou pas, le fait d’être différent dans son développement, comme elle l’a été pour les gauchers à une époque où on leur interdisait de se servir de leur main gauche et où on les a stigmatisés. Idem pour les enfants adultérins. Maintenant, ce sont des choses sur lesquelles on ne se pose plus la question. Le social a au départ une grosse influence sur le développement « naturel », ce n’est pas quelque chose de neutre.

 

Question : En conférence, lorsque tu parles au même titre que des intervenants universitaires, médecins, etc, quel poids ton discours a-t-il après que tu l’ais établi comme “expert” ?

– Je ne sais pas s’il est plus ou moins bien perçu. Soit j’interviens seul et là, il n’y a pas de souci et quand c’est avec d’autres, ça dépend de ce que l’on dit, de quoi il est question. Je n’ai pas remarqué que mes propos n’étaient pas pris au sérieux. Ce sont plutôt certains intervenants qui pourraient ne pas être intéressés par ce que j’ai à dire. Soit parce que ce sont des gens très connus et finalement, ils se permettent d’arriver juste pour leur intervention et repartent juste après, ou encore, comme Mireille Bonierbale, en tentant de remettre en cause ce que je disais comme si cela n’avait pas de valeur, m’obligeant à élever la voix. J’ai un diplôme, je travaille sur les mêmes choses qu’elle, je n’arrive pas aux mêmes conclusions mais ai-je tort pour autant puisqu’elle ne démontre pas davantage que moi la justesse de son analyse. Je n’avais jamais connu auparavant ce genre de situation.

 

Question : Que réponds-tu face aux accusations selon lesquelles on ne peut pas être juge et partie, être trans’ et soignant ?

– Je ne suis pas plus juge et partie qu’un non trans’, dès lors que je n’ai pas d’intention par rapport aux gens qui viennent me voir. Je n’ai pas d’intention sur leur vie, c’est leur vie, pas la mienne. Je ne suis pas plus juge et partie que quelqu’un qui est négatif avec l’idée que les trans’ c’est tout dans la tête, qu’il ne faut pas les prendre en charge ou qui a une intention particulière : empêcher ou ralentir la transition. Pour moi, ça c’est quelqu’un qui est juge et partie. Et c’est même plus grave. Ce genre d’attitude a fait perdre beaucoup d’années à beaucoup de gens qui étaient concernés. L’intervention psy n’est pas neutre quand elle est négative ou quand elle est orientée dès le départ. Le but, ce n’est pas d’influencer dans un sens ou un autre, c’est de laisser les personnes prendre leurs décisions une fois qu’elles ont les informations pour pouvoir s’orienter et avancer à leur rythme.

 

Question : En décembre, à la Sorbonne, les quelques personnes que j’ai interrogées, en général et sur les interventions de M. Bonierbale et C. Chiland, disent en gros, elles vendent leur carrière, leurs livres mais ce n’est pas une démarche de médecins. Elle est où là l’expertise ?

– Chiland a assez écrit de trucs sur le sujet, on voit ce qu’elle en dit à chaque fois et elle met toujours l’accent sur une forme de dévalorisation du style on a beau vouloir changer les mots, il y a une réalité que l’on ne peut pas nier, on va rendre les gens stériles… Pourquoi ne pourrait-on pas décider de se faire stériliser ? Pourquoi faudrait-il forcément être fertile ? L’humanité n’est pas en voie d’extinction ! Et puis il y a de nombreux trans’ qui ont eu des enfants avant de faire leur transition. Ou encore comme dit Bonierbale, les gens prennent des hormones comme des bonbons, les trans’ savent que ce ne sont pas des bonbons. Autre affirmation de Chiland, ce n’est pas un vrai changement de sexe, les chromosomes resteront ce qu’ils étaient, personne ne prétend le contraire ! Mais qui prétend que ça va changer les chromosomes ? Est-ce qu’il y a des trans’ qui pensent qu’ils vont avoir des chromosomes masculins après avoir fait une transition FtM ou inversement, est-ce que des MtF prétendent qu’elles vont avoir des règles après leur opération génitale une fois qu’on leur a expliqué en quoi cela consistait ? Je ne pense pas qu’il y ait une seule personne informée qui dise, « je vais avoir les chromosomes changés, mes règles après ». Je n’ai jamais entendu cela. Sinon, là on peut dire qu’il y a un problème de délire et cela ne relève peut-être pas de la question transidentitaire.

 

Question : C’est ce qui m’est arrivé. Breton m’envoie chez Luton, ils vérifient mes chromosomes et me disent, vous êtes XY donc… vous êtes un homme. Je reprends leur propre argumentaire et croyance. Mais c’est « délirant » cette idée là.

– Tout à fait puisqu’il y a des hommes XX et des femmes XY, même s’ils sont minoritaires, ils n’en sont pas forcément stériles, (je connais un cas d’homme XX et père de 2 filles), et n’en sont pas moins des êtres humains. Si XY est l’un des constituants chromosomiques d’une majorité d’hommes et XX un des constituants d’une majorité de femmes, en aucune façon, cela n’en fait des mâles ou des femelles, cela ne suffit pas à faire le sexe ! La sexuation comprend plusieurs étapes depuis l’embryogenèse jusqu’à l’âge adulte. A chaque étape, elle peut prendre une direction ou une autre sous l’influence de différents facteurs, qu’ils soient biologiques ou environnementaux. C’est pourquoi les états intersexués sont très variés et très nombreux, bien plus qu’on ne veut le dire. En plus de sa sexuation biologique, il faut ajouter toutes les influences éducatives, sociales et culturelles qui interagissent dans le développement psychologique d’un individu pour aboutir à un homme et à une femme.

 

L’au-delà des questions trans

Question : C’est juste cette idée que XY c’est un homme, XX une femme… On est, à la fois, dans la tradition et plus loin, dans la croyance. Après tout, qu’est-ce qui justifie de ne pas opérer les trans’ et d’opérer les intersexes sinon cette tradition et cette croyance ? L’expertise trans’ est un réexamen de cette croyance et tradition.

– C’est nécessaire de revoir toutes ces fausses croyances comme le fait de croire que l’attirance amoureuse et sexuelle est une chose stable durant toute la vie pour tout le monde. J’ai constaté chez pas mal de trans’ que lorsque l’on remet en question les préceptes de l’identité et de la sexualité, le fait qu’être homme ou femme ne soit pas si naturel que cela, on en arrive à remettre en cause le fait d’être attiré-e par un homme ou une femme plutôt que par une personne. Ce n’est plus une question génitale mais une question de rencontre, de personnalité. Si les cultures le permettaient et si l’ensemble de la population mondiale se posaient ces questions, je pense qu’on aurait une minorité d’hétérosexuels et d’homosexuels exclusifs et une majorité de gens qui seraient attirés non par un sexe (pénis, vagin) mais par une personne. Dit autrement, l’hétérosexualité et l’homosexualité exclusives pourraient être considérées comme une forme de fétichisme par le fait de vouloir trouver absolument un pénis ou un vagin chez le-la partenaire ! Dans ce cas, l’hétérosexualité et l’homosexualité exclusives devraient figurer parmi les paraphilies dans le DSM. Cela me fait penser à l’arroseur arrosé, ce qui pourrait prêter à sourire dans un autre contexte…

 

Question : Ce sont finalement les hiérarchies qui font des drôles de réalités construites que sont l’homme et la femme, les intersexes et aujourd’hui les trans’ ?

– Evidemment puisque la hiérarchie supérieure, c’est l’homme, après c’est la femme. Tout ce qui n’est pas un homme, c’est forcément une femme. Un gay n’est pas considéré comme un homme au sens propre du terme, c’est forcément moins bien qu’un homme, si ce n’est pas un homme c’est un « sous-homme », donc une « femme » ou une « femmelette »… C’est toujours péjoratif.

 

Question : Si je te suis, un homme c’est quelqu’un qui est 1/XY ; 2/ hétérosexuel ? Tous les autres critères ne comptent pas ?

– On peut ajouter, en effet, un homme masculin… parce qu’il n’est pas efféminé. Donc, ça donne un homme de sexe mâle, de genre masculin et d’orientation hétérosexuelle.

 

Question : Tous les gens qui ont changé de genre et qui reprennent le terme « trans », qui se visibilisent comme tels aujourd’hui, qui remettent en cause à leur tour les attendus binaires, ils viennent déborder les transsexuels eux-mêmes comme si les trans’ se trouvaient dépossédés de ce mot, cette réalité.

– Je pense que c’est du mot « transsexuel » dont les trans’ ne voulaient pas, par ce que trans’, transgenre, transidentité, c’est autre chose, c’est différent. Pour moi, « transsexuel », c’est une personne qui est attirée exclusivement par des personnes transidentitaires. Il y a des gens qui sont comme cela, on les appelle aussi les « translovers ». En fait, c’est une “nouvelle” attirance amoureuse et sexuelle. Ensuite, il y a les rencontres, des personnes qui se sont rendues compte que ce n’est pas très important d’être hétéro, homo, etc, que l’essentiel était d’être attiré par une personne particulière. D’ailleurs est-ce que ce sont des personnes qui ont beaucoup de relations sexuelles ? Pas forcément. C’est d’abord une attirance amoureuse et affective qui, ensuite, peut être sexualisée ou pas. Surtout, chez les MtF, où il y a une grande difficulté à trouver des partenaires hommes qui vont les accepter pour ce qu’elles sont, à savoir des femmes comme elles se ressentent même si ce sont des « femmes différentes ». Il y a peu d’hommes qui ont cette capacité à dire, « oui ma femme est (d’origine) trans’ et ce n’est pas un problème, elle est une femme » et qui ne vont pas se sentir diminués par cela.

 

Question : Un psychologue de l’université Paris 8 en ethnopsychiatrie, Jean-Luc Swertvaegher[1], a émis l’idée que les trans’ se construisaient en-dehors du sexe. Qu’est-ce que tu en penses ?

– Les trans se construisent différemment, ça c’est sûr. Mais est-ce par rapport au sexe ? Je ne sais pas parce qu’il y a des trans’ qui ont érotisé la question et d’autres pas. Donc, c’est très variable, je n’en tirerai pas une généralité. Je sais juste que, pour une partie des trans’, ce n’est pas la chose la plus importante. Cela reflète aussi la population rencontrée au Centre Georges Devereux. Avec Jean-Luc, nous avons travaillé ensemble dans un groupe de recherche créé et dirigé par Françoise Sironi.

 

Question : C’est une transformation de l’usage classique de l’expertise. Ce n’est pas quelque chose de spécifique aux trans’ ?

– Ce n’est pas nouveau, c’est reconnu et accepté, par exemple avec les maladies rares, le sida, les diabétiques… Il y a des gens qui discutent avec les médecins, leur généraliste, qui connaissent très bien leurs traitements, s’il faut en changer ou pas, etc.

 

La question trans, le suivi

Question : Qu’est-ce que le transsexualisme a à voir avec la psychiatrie ?

– Pour moi rien, mais des médecins ont jugé que, puisqu’il n’y a pas de preuve physiologique, ça doit être dans la tête. L’idée, c’était peut être de trouver un remède mais depuis plus d’un siècle, aucun traitement n’a été trouvé et, par ailleurs, tous les essais thérapeutiques sur le plan psychique, que ce soit avec des produits neurochimiques, les électrochocs, la chirurgie du cerveau ou des thérapies, aversive ou pas, rien n’a fonctionné. Par contre, les traitements hormonaux et chirurgicaux fonctionnent très bien. A t-on déjà vu un traitement hormonal ou chirurgical soigner une maladie mentale ? J’en conclus que ce n’est pas un problème psychiatrique, on ne peut pas résoudre cette question identitaire par la voie psy. Maintenant la science n’est pas capable de dire, l’origine, la source du problème. Peut-être qu’elle est multiple, peut-être qu’il y a des facteurs environnementaux qui viennent s’associer à des facteurs biologiques et des facteurs culturels mais ça n’a aucune importance. On peut chercher mais ça ne devrait pas empêcher qu’on prenne en charge en constatant que la personne a toute sa tête dans ce qu’elle demande avant de commencer ce traitement. Il n’y a pas d’autre vérification à faire.

 

Question : Dès le départ, selon leurs propres attendus, ils ont défini que c’était un « diagnostic différentiel », on vérifie qu’il y a une véritable maladie mentale ou un trouble et le transsexualisme lui-même.

– Je ne sais pas si les médecins le savaient dès le départ mais ils ont privilégié l’hypothèse d’une maladie mentale. Au début, ils ont parlé de « diagnostic positif de transsexualisme », puis, depuis qu’ils conviennent qu’en dehors de la transidentité les personnes ont bien toute leur tête, de « diagnostic différentiel ». Le but de ce « diagnostic différentiel » est, disent-ils, d’éliminer toute pathologie qui pourrait se donner l’apparence du transsexualisme telle que la dysmorphophobie, un épisode délirant, le transvestissement fétichiste (dont on sait qu’il peut cohabiter avec une variation de l’identité de genre et que de ce fait, il n’est pas une contre indication)… Tout comme au départ, les tests servaient au diagnostic positif ou différentiel, ils servent maintenant au pronostic ! Bref, dès que l’on démonte un argument, ils en trouvent un autre pour tenter de maintenir leur main mise sur les trans’.

 

Question : Quelle différence entre maladie mentale et trouble ?

 – Les troubles sont moins graves, on peut avoir des troubles psychologiques ou psychiatriques même et en avoir conscience. Une maladie mentale, c’est quand la personne n’a pas conscience qu’elle ne va pas bien, c’est le cas des délires par exemple. Elle n’est pas en état de prendre de décisions éclairées car elle a un dysfonctionnement qui l’empêche de raisonner clairement, donc de décider.

Par exemple une personne qui a des TOCs, (troubles obsessionnels compulsifs), a quand même toute sa tête. Cela ne devrait pas l’empêcher d’avoir accès à une prise en charge et un THC si elle a en plus une variation de l’identité de genre et qu’elle demande une transition. Cette personne est parfaitement capable de comprendre ses symptômes, que c’est un problème et d’ailleurs, elle le sait, elle le dit. Si elle ne venait pas en consultation dire « je suis envahie par ces TOCs et ça me coûte de me laver les mains si souvent, etc », les psychiatres ne le sauraient pas puisqu’ils ne l’auraient jamais vue. C’est bien elle qui constate un dysfonctionnement, qui va voir un psychiatre pour se faire aider. (C’est d’ailleurs un point en commun avec la transidentité.) On ne peut pas dire que cette personne est un malade mental. Elle a un problème qui effectivement l’handicape au quotidien mais cela ne la rend pas irresponsable, elle ne fait pas pour autant n’importe quoi. Donc, ce n’est pas une contre-indication de mon point de vue. C’est un trouble qui nécessite un accompagnement, une aide, mais en aucune façon, ce n’est une contre-indication pour pouvoir faire une transition.

 

Question : En France, avec la première équipe, la clinique trans’ et intersexe est solidement établie ? Il y a déjà des études, des suivis, ils savent depuis vingt ans que la réponse hormono-chirurgicale est valable ?

– Je ne suis pas sûr qu’il y ait eu un tel écart, que les suivis ont commencé si tôt au Etats-Unis. C’est dans les années 60 mais il y a eu un écart de 10 à 15 ans avant qu’on commence à s’y pencher en France. Il n’y avait pas un recul si important qui permette de dire que les traitements hormono-chirurgicaux étaient la bonne réponse. Cela n’est rentré dans le DSM que dans les années 80.

 

Question : Au cours des discussions lors de la rencontre à la Sorbonne (décembre 2010), il y a eu de la part de Mes Bonierbale et Chiland, un seul mot : la souffrance. Au nom de la souffrance, on vient prendre en charge mais c’est devenu un mot vide de sens maintenant que les gens souffrent moins, communiquent et sont dans des groupes. Qu’est-ce que devient cette souffrance dans la justification de la prise en charge ?

– Je ne dirai pas qu’il n’y a plus de souffrance chez les trans’, il y en a qui ont des souffrances et d’autres pas, ou moins. Donc, c’est très variable. Mais ce n’est pas parce qu’il y a moins ou pas de souffrance qu’il ne faut pas prendre en charge et ce n’est pas le seul motif. Avoir quelqu’un qui fonctionne bien dans la société, c’est toujours mieux. Par ailleurs, si la personne ne souffre pas maintenant, ça ne veut pas dire qu’elle ne souffrira pas plus tard. Ce n’est pas la peine d’attendre qu’elle souffre pour l’aider. Si elle présente ce problème, il faut l’aider. Pour être efficace, autant le faire dans les meilleures conditions plutôt que d’attendre qu’elle souffre et le faire quand elle sera au plus mal.

 

Question : Ce dont souffraient le plus les gens, c’est l’isolement, les agressions, plus que du fait d’être trans’ ?

Effectivement, c’est plus le regard social, les problèmes sociaux, le regard des autres, l’acceptation dans la société… La transphobie est encore bien répandue. Quelqu’un qui ne prend pas les transports en commun ne peut pas se rendre compte à quel point on peut se faire agresser juste à cause de ça, particulièrement en région. Quant à la solitude ou l’isolement, quand on ne les a pas choisis, c’est terrible. Le pire c’est l’hypocrisie, les petites réflexions en passant qui ne s’adresse pas vraiment à la personne mais qui sont faites intentionnellement lorsqu’elle se trouve à proximité des auteurs qui pouffent de rire. Impossible de répondre ou de se défendre car les agresseurs bottent en touche et se moquent de la personne trans’. Difficile de porter plainte pour des mots… A force de répétition, les victimes s’isolent, ne sortent plus à certaines heures, évitent certains endroits… Les mots sont parfois plus terribles que les coups.

La question trans’, c’est surtout un problème de classe sociale. Quelqu’un a qui de l’argent s’en sortira toujours, quelqu’un qui n’en a pas, beaucoup moins bien. Tout est lié d’abord au statut social de la personne et ensuite au regard social. Quand on est riche, on a plus facilement la possibilité d’imposer ses décisions que quand on est pauvre et dépendant des autres. Donc, la première chose, c’est un problème social. C’est aussi un problème médical mais pas seulement.

 

Question : Y a t-il des lieux ou cette expertise trans’ n’est pas contestée ni même discutée mais simplement entérinée ?

Ça dépend des lieux, de leur propre fonctionnement. C’est peut être dans le milieu des festivals de cinéma que l’on trouve le plus cette attitude. Il y a aussi des professionnels (des éducateurs, des enseignants, des psys) qui comprennent que la parole des personnes concernées est importante et qu’ils ne peuvent pas s’y substituer, ils vont donc plutôt faire appel à des gens qui sont passés par cette expérience pour faire des formations ou des exposés sur le sujet. Dans ce cas, c’est franchement vécu comme un apport parce qu’eux-mêmes ne sauraient en parler de cette façon car, même s’ils connaissent la question, ils ne s’estiment pas suffisamment compétents pour pouvoir en parler ou ils ne souhaitent pas le faire à la place des trans’. Mais ce n’est malheureusement pas une démarche que l’on va retrouver unanimement partout.

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[1] Jean-Luc Swertvaegher, Les psy à l’épreuve des transsexuels … ou penser les êtres humains sans le sexe, http://www.ethnopsychiatrie.net/swertusagers.htm


Entretien mis en ligne, décembre 2010.

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